
Le 28 avril 2025, une panne d’électricité majeure a frappé l’Espagne, le Portugal, le sud-ouest de la France et l’Andorre, privant des millions d’usagers d’électricité pendant plusieurs heures. Cet événement souligne les vulnérabilités croissantes du réseau électrique européen à l’heure de l’accélération des énergies renouvelables.
Un contexte qui fait écho à un rapport publié ce Mardi 13 mai 2025
Le rapport de Beyond Fossil Fuels, Ember, E3G et IEEFA, publié ce 13 mai 2025, analyse la capacité des gestionnaires de réseau européens (TSOs) à accompagner la transition énergétique. Sans évoquer directement la panne du 28 avril, il apporte un éclairage pertinent sur les limites actuelles du système.
Principales conclusions
- 1 700 GW de projets d’énergies renouvelables répartis dans 16 pays (2024-2025) sont actuellement bloqués dans les files d’attente de raccordement au réseau — soit plus de trois fois la capacité nécessaire pour atteindre les objectifs énergétiques et climatiques de l’UE à l’horizon 2030.
- 7,2 milliards d’euros d’électricité renouvelable ont été écrêtés (non injectés sur le réseau) dans seulement sept pays en 2024, ce qui signifie que de l’énergie propre a été gaspillée, tandis que les producteurs ont été indemnisés pour l’électricité qu’ils n’ont pas pu vendre.
- Seuls cinq GRT (gestionnaires de réseaux de transport) prennent en compte des scénarios de planification dans lesquels le charbon et le gaz fossile sont remplacés par des renouvelables d’ici 2035, alors que 13 pays visent pourtant une décarbonation de leur secteur électrique sur la même période.
- 11 des 34 GRT fonctionnent encore sous la forme minimale de séparation juridique (unbundling), ce qui signifie qu’ils font toujours partie d’un portefeuille de sociétés impliquées dans la production ou la vente d’électricité, et ne sont pas indépendants d’intérêts commerciaux. Le Royaume-Uni est un leader en la matière, ayant créé le National Energy System Operator (NESO) — un organisme public indépendant du GRT responsable de la planification, National Grid.
- Seuls cinq régulateurs de l’énergie intègrent explicitement la neutralité carbone dans leurs missions légales, tandis que 11 GRT ne font aucune référence aux objectifs climatiques dans leurs activités.
Recommandations clés
Les auteurs appellent à :
- Moderniser les réseaux avec des plans compatibles climat.
- Créer des entités de planification indépendantes.
- Éliminer les projets « zombies » et accélérer les raccordements.
- Déployer les technologies de flexibilité intelligente (DLR, stockage, effacement).
- Encourager le financement vert et la transparence.
Synthèse des enjeux
Bien que non mentionnée dans le rapport, la panne du 28 avril illustre les dérives que ce dernier anticipe : un réseau sous tension, peu flexible, encore trop dépendant du gaz. L’intégration progressive des Balkans au réseau européen et les événements de 2024 dans cette région renforcent ce constat : sans transformation rapide, ces pannes pourraient se multiplier.
Moderniser les réseaux, renforcer la flexibilité et planifier en cohérence avec les objectifs climatiques sont les conditions d’un système électrique résilient et durable.